Le seul politicien que Biya respecte et craint à la fois c'est Maurice Kamto
Les autres, il les a achète, tels des objets, pour jouer un rôle. Quand on a demandé la démocratie, l’homme a créé sa démocratie avec ses opposants. Et si on lui demandait: « votre pays est-il démocratique ? », il répondait aisément : « bien sûr que oui! Le Cameroun compte plus de 300 partis d’opposition qui concourent régulièrement aux suffrages universels; plusieurs d’entre eux sont représentés à l’assemblée et gèrent des communes ».

Tout avait en fait été arrangé d’avance. Des militants du RDPC devenaient présidents de partis satellites avec cette mission claire : accompagner le Parti-noyau lors de ses mascarades électorales et gagner en retour quelques enveloppes. Une catégorie de ces partis, les maîtres chanteurs, ceux-là qui avaient acquis une notoriété plus ou moins relative auprès du peuple camerounais au lendemain de l’élection présidentielle de 1992 (SDF, UNDP, UDC, UPC) obtenaient en plus de l’argent, quelques postes représentatifs à l’assemblée nationale; des postes sans incidences mais qui servaient quand-même à animer le parlement. Au cours des sessions, ils défilèrent devant le prétoire, crièrent leur rage contre les maux de leur communauté, faisaient du vacarme, avaient même le droit d’indexer Paul Biya comme le problème. Et les journaux titraient ces mois là: « débats houleux à l’assemblée nationale sur la nouvelle loi des finances entre l’opposition et le parti au pouvoir ». Stationnant devant des kiosques, les passants lisaient les unes de ces journaux et retenaient que l’acte démocratique avait eu lieu.
Mais l’opposition pensée, fabriquée et désignée par Paul Biya, avait une certaine ligne rouge à ne pas franchir : elle ne devait pas organiser de manifestation publique en dehors du sillage électoral tracé tous les 05 et les 07ans par le grand « démocrate ». Lorsqu’une campagne électorale s’achevaient et que le RDPC eut tout raflé à 98%, ceux des opposants qui n’avaient pas d’élus retournaient sagement dans leurs « casernes » en attendant les prochaines élections. Les autres quant à eux, participaient trois fois par an au « débat parlementaire » pour nuancer l’applaudimètre des lois suicidaires avec des grognes théâtrales d’indignation. Pas question de critiquer le code électoral, il est bon; même trop. Les problèmes de la société sont des totems dont il ne faut pas parler etc. Telle était la ligne rouge à ne pas franchir. Et ils ne la franchirent pas. Ceux qui, comme les vrais opposants au sein du SDF, le faisaient risquaient un désaveu de la part de la hiérarchie.
Avec un tel simulacre, Paul Biya dormait tranquille. Ses ministres, eux, s’occupaient à corrompre les nouveaux venus sur la sphère politique et intellectuelle, à éliminer physiquement, carcéralement ou par l’exil, ceux qui avaient de réelles intentions de nuire à la « sainte » image de l’homme lion...
Puis vint l’année 2012 où tout allait changer. Plusieurs partis politiques de l’opposition qu’on croyait être, associés à des leaders de la société civile décidèrent de créer une alternative crédible au régime Biya.
Ainsi fut né le MRC. Au début, nombre de ces acteurs n’envisageaient pas ce parti suivant l’enjeu de la renaissance. Ils le voyaient plus comme un instrument de chantage, un moyen de pression pour obtenir du régime Biya ce que leurs anciennes postures ne leur avaient pas permis d’obtenir. La désignation de Maurice Kamto, qu’ils connaissaient tous pour sa rigueur et son intégrité, en tant que Capitaine de cette nouvelle formation dissuada le grand nombre. Ils quittèrent progressivement le navire, retournant au RDPC sous le masque de leurs partis satellites ou de la société civile.
Maurice Kamto et son équipe ont, au fil des dernières années posé dans le cœur des camerounais les jalons de cette alternative crédible malgré l’adversité, malgré la force sauvage et brutale de l’intelligence répressive. Ils ont franchi la ligne rouge, clamant le droit à la manifestation publique et pacifique, dénonçant les maux qui minent la société, critiquant les failles du système électoral, seul électeur de Paul Biya, non sans proposer des pistes de solution à chaque fois. Ne pouvant les acheter, Biya a dû rompre avec l’illusion démocratique savamment entretenue depuis 1992: interdiction systématique des meetings du MRC pour « trouble à l’ordre public et insurrection », suspension de salaire des fonctionnaires militants de cette formation, répression policière, arrestations politiques, instrumentalisation de la haine anti-bamileke, intimidations et violences morales, violation des droits fondamentaux, black-out médiatique sur toutes les activités politiques du MRC etc.
Dès lors, tout ce qui servait à entretenir cette illusion démocratique a été consacré à la lutte contre Maurice Kamto. L’objectif des faux opposants, ceux qui désormais se font appeler des opposants républicains, a ainsi changé. Il faut neutraliser Maurice Kamto, même sans argument.
Je disais donc que Maurice Kamto est le seul homme politicien que Biya redoute et respecte à la fois depuis plusieurs années. Il n’y a qu’à évaluer l’investissement adressé à sa neutralisation depuis 2012 pour le comprendre. Les autres ne sont à ses yeux qu’une sorte de marchandise de seconde main, qu’il achète pour un appui dans sa bataille contre le Professeur.
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