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LA SUISSE VA-T-ELLE S'ÉLOIGNER DE LA NEUTRALITÉ ET SE RAPPROCHER DE L'OTAN?

En Suisse, le conflit en Ukraine lance un débat sur la sécurité du pays. Le ministère de la Défense prépare un rapport qui pourrait avoir des conséquences sur le statut de neutralité.


La guerre en Ukraine a de profondes conséquences en Europe. Après la volonté de la Finlande et la Suède d'entrer dans l'Otan, c'est désormais la Suisse qui envisage de se rapprocher de l'organisation et de s'éloigner de son statut de neutralité.

Lors d'un voyage à Washington cette semaine pour évoquer le contrat de F-35, la ministre de la Défense Viola Amherd a admis que la Suisse devrait travailler plus étroitement avec l'alliance militaire dirigée par les États-Unis, sans toutefois la rejoindre formellement.


La Suisse "ne peut rejoindre aucune alliance en raison de sa neutralité. Mais nous pouvons travailler ensemble et les systèmes que nous achetons sont une bonne base pour cela", a déclaré le ministre de la Défense Amherd à la chaîne de télévision SRF.

Exporter armes et munitions

Toutefois, la ministre a considéré qu'un débat ne peut être évité.

"La loi de la neutralité est claire: les exportations d'armes ne sont pas autorisées. Mais nous devons avoir une large discussion politique sur la politique de neutralité", a déclaré la ministre dans un entretien à la Sonntagsblick.

Son cabinet prépare un rapport de sécurité dans lequel il envisagerait de participer à des exercices militaires avec les pays de l'Otan. Pour Paelvi Pulli, responsable de la politique de sécurité au ministère suisse de la Défense, ces opérations auraient un impact sur l'interprétation de la neutralité.

Ce rapport sera soumis au Parlement pour discussion et servira de base à d'éventuelles décisions sur l'orientation future de la politique de sécurité suisse. Le ministère de la Défense travaille également avec le ministère des Affaires étrangères sur un projet permettant d'adopter des sanctions et d'exporter armes et munitions.

"Il y a beaucoup de malaise que la Suisse ne puisse pas contribuer davantage pour aider l'Ukraine", a déclaré à Reuters Paelvi Pulli.

Bien que disposant d'une armée et d'un service militaire obligatoire, la Suisse n'a participé à aucun conflit international depuis 1815, date à laquelle ce principe a été adopté au Congrès de Vienne. Cette règle lui interdit d'envoyer des troupes à un pays en guerre, de l'armement ou mettre son territoire à la disposition des parties belligérantes. Ce statut a été mis à jour en 1990, après la chute de l’Union soviétique pour permettre la coopération internationale en matière humanitaire.

La remise en cause de ce principe qui n'a même pas été soulevée lors des deux guerres mondiales, a le soutien d'une partie de plus en plus importante de la population. Selon Reuters, l'armée suisse y est favorable pour renforcer la défense nationale. L'opinion publique qui a toujours refusé ce changement modifie son point de vue. Lors d'un sondage réalisé en avril, 56% des Suisses sont désormais favorables au renforcement des liens avec l'Otan. Ils sont même un tiers à vouloir que leur pays y adhère totalement.


L'oeil de Moscou


Chez les politiques, le débat se fait avec nuance. Thierry Burkart, chef du Parti libéral démocrate de centre-droit, qui fait partie de la coalition au pouvoir, estime que la neutralité "doit être flexible".

"Avant l'Ukraine, certaines personnes pensaient qu'il n'y aurait jamais d'autre guerre conventionnelle en Europe. Ce conflit montre que nous ne pouvons pas être complaisants", a-t-il déclaré à Reuters en précisant qu'il ne souhaite pas une adhésion à part entière.

Viola Amherd a également le soutien du parti centriste dont elle est issue. Son président, Gerhard Pfister, a déjà demandé au Conseil fédéral d’autoriser l’Allemagne à exporter du matériel de guerre suisse vers l’Ukraine.

"Pourquoi la Suisse livre-t-elle des armes à l’Arabie saoudite, mais pas à l’Ukraine? À partir de quand la neutralité devient-elle indécente?", a déclaré Gerhard Pfister lors d'une assemblée de son parti politique.

Par contre, pour Peter Keller, secrétaire général de l'extrême droite Parti populaire suisse (UDC), un rapprochement avec l'OTAN est incompatible avec la neutralité. "Il n'y a aucune raison de changer cette maxime de politique étrangère qui nous a apporté la paix et la prospérité", a déclaré à Reuters Peter Keller.

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En Russie ces discussions sont surveillées de près. Vladimir Khokhlov, porte-parole de l'ambassade de Russie à Berne, signale que Moscou ne "pourrait pas ignorer" ce changement "radical" qui aurait des "conséquences".

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